1. J’attends cet enfant depuis longtemps, je sais que je ne serai pas touchée par la dépression.
F., 32 ans
maman d'un petit garçon de 2 ans et enceinte de son deuxième bébé
Ce témoignage démontre bien qu’attendre un enfant avec impatience et amour ne signifie pas que l’annonce de la grossesse sera vécue comme la meilleure chose au monde. La réalité est que la dépression peut impacter n’importe qui. Il faut bien comprendre que cette dépression est causée par une combinaison complexe de plusieurs facteurs : hormonaux, biologiques, environnementaux et psychologiques.
La dépression périnatale touche 10% à 20% des femmes entre le dernier trimestre de grossesse et les 6 mois post partum. Il existe des facteurs de risque de développer ces symptômes, indépendants du désir de grossesse et de l’investissement de l’enfant : ATCD de troubles psychiatriques personnels ou familiaux, ATCD de maltraitance, Facteurs de vulnérabilité socio économiques (isolement social, violences conjugales, difficultés économiques, parcours de vie difficile.), tempérament du bébé, complications obstétricales.
Les identifier et parler de son vécu permet de prévenir l’installation de la dépression, d’apaiser la patiente, de sensibiliser son entourage pour qu’il lui apporte le soutien nécessaire, et d’avoir recours à des prises en charge adaptées.
2. Toutes les mères ont naturellement l’instinct maternel
L’instinct maternel serait inné, une capacité pour toutes les mamans à prendre soin de son bébé, à l’aimer instantanément… Il est nécessaire de saisir la différence entre « naturel » et « immédiat ». Pour beaucoup de mamans, la naissance ne représente pas la création du lien instantané avec leur bébé.
Je suis Maman, j’aime mes enfants et pourtant à la naissance je n’ai pas connu cet instinct maternel. J’ai hurlé et cherché à comprendre, je suis pourtant normale ?
Devenir mère est un apprentissage et il est courant d’être déconnectée au début, et incertaine dans les gestes. Cela ne signifie pas que le lien ne va pas se créer avec du temps et de la patience.
Une mère doit s’accorder une bonne dose de bienveillance et d’indulgence envers elle-même. Parfois, perdue dans un flot d’émotions inavouables, elle n’ose pas se confier. Or, en discutant un peu, on s’aperçoit que d’autres ressentent les mêmes sentiments. Par ailleurs, l’histoire de vie, le contexte de la grossesse et de la naissance sont autant d’éléments qui peuvent déstabiliser la mère, l’empêcher de se connecter à son enfant et l’amener à culpabiliser profondément. Le lien entre la mère et l’enfant se construit, peu à peu ou soudainement, différemment d’une femme à l’autre. Il s’enrichit avec le temps et l’habitude. Le chemin est propre à chacune et peu importe la voie empruntée, il n’y a pas de meilleures mères qu’une autre. Simplement des femmes faisant du mieux qu’elles peuvent.
CF. L’instinct maternel : une vaste supercherie, finalement assez récente, France Inter
Il n’y a pas de réalité scientifique correspondant à la notion d’instinct maternel. Le lien qui se crée avec l’enfant peut se nouer progressivement, sans incidence sur la qualité de la relation. Pendant la grossesse la taille de certaines structures cérébrales de la mère va varier, au profit de celles impliquées dans la compréhension et la réponse aux besoins du bébé. A la naissance, le bébé va dépendre entièrement d’un adulte pour combler ses besoins, et cela pendant toute la première année de la vie, il va donc se manifester pour les exprimer, c’est le comportement d’attachement. Les réponses de l’adulte vont instaurer une relation d’attachement, qui va sécuriser petit à petit l’enfant, par la répétition de comportements réponse prévisibles qui l’apaisent. Même si la mère ne ressent pas immédiatement un lien très fort envers son bébé, le fait de répondre de façon adaptée à ses besoins suffira à le sécuriser dans un premier temps, laissant le temps à chacun de faire connaissance pour construire un lien singulier.
3. J’ai un parent sujet à la dépression, je vais donc aussi être touchée par la dépression
La dépression n’est pas héréditaire, elle ne se transmet pas. La dépression est influencée par une multitude de facteurs : l’environnement dans lequel nous vivons, notre entourage et notre propre gestion du stress avec nos mécanismes de défenses. Avoir un parent qui a souffert de dépression ne signifie pas qu’on souffrira à notre tour de dépression. Cela peut augmenter le risque mais il ne s’agit que d’un risque, pas d’une certitude. Beaucoup d’éléments environnementaux entrent en ligne de compte, comme le contexte de vie, l’histoire de chacun et les facteurs biologiques. Au contraire, on peut n’avoir aucun parent sujet à la dépression et développer soi-même un état dépressif. La maladie peut toucher tout un chacun. L’important est d’en reconnaitre les symptômes et de bénéficier de l’aide de son entourage, des soignants.
Un antécédent familial de trouble psychiatrique, et en particulier de dépression périnatale chez sa mère, augmente le risque de dépression du post partum chez la femme. Toutefois, il ne s’agit pas d’une transmission génétique simple, mais d’une vulnérabilité, qui pourra s’exprimer ou non selon le contexte. Avoir connaissance de ce léger sur risque, permet d’anticiper et prévenir la survenue d’une DPP. Il est important de le mentionner à sa sage-femme ou son gynécologue, pour qu’une attention particulière soit portée à la santé mentale des mères, et un soutien proposé en cas de difficultés repérées.
4. Seules les mères sont touchées par la dépression
Quelques mots d’une mère, sur l’état psychologique de son mari, après la naissance de leurs fils :
Anonyme
Un papa qui se met en retrait, un papa qui n’arrive pas à s’occuper de son bébé ou qui a des variations d’humeur importante peut également souffrir de dépression. Si ces signes sont repérés, il faut en parler, consulter. La dépression n’est pas réservée aux mères et peut très bien toucher le père, concomitamment à la mère ou non.
5. La dépression post-partum arrive immédiatement après la naissance
La dépression post partum peut toucher la mère et/ou le père dans l’année de naissance de l’enfant. Il n’y a pas de moment précis pour que la maladie survienne. Il est important de distinguer le « baby blues » de la DPP. Le “baby blues” peut être ressenti jusqu’au dixième jour suivant l’accouchement. C’est une période de légère tristesse qui disparaît rapidement.
Les sentiments éprouvés lors d’une dépression sont eux bien plus sévères et se manifestent par des symptômes progressifs : manque d’énergie, perte de plaisir, pensées négatives, l’hypervigilance troubles du sommeil. Ils ne s’estompent pas en deux semaines et doivent amener à consulter. Les professionnels de santé sont de plus en plus formés à détecter les signes d’une DPP lors des visites postnatales ou lors de rdv pour le bébé.
Un tiers des dépressions périnatales débutent au dernier trimestre de grossesse, et elles peuvent survenir jusqu’au 1 an de l’enfant. Contrairement au Baby Blues, réaction non pathologique courante qui survient autour du 3ème jour après la naissance, avec une instabilité forte des émotions et de leur intensité, et qui disparaît en 48h, après la chute hormonale de la fin de grossesse, la dépression du post partum va s’inscrire dans la durée, avec des symptômes ressentis pendant au moins 15 jours d’affilée.
6. Si je suis en dépression je vais forcément être triste et laisser mon bébé de côté
L’état dépressif est propre à chaque individu, la personne touchée par la maladie peut autant être couchée dans son lit que donner l’image d’aller bien. Il faut savoir que la DPP ne se manifeste pas de la même manière chez toutes les mamans. Malgré leur détresse, certaines mères continuent à très bien s’occuper de leur bébé, même si elles sont émotionnellement détachées ou submergées. A contrario, certaines vont se surinvestir et devenir excessivement protectrice envers leur bébé.
Il n’y a pas lien direct entre la dépression et le fait de laisser son bébé de côté, les troubles se manifestent de façon différente pour chaque mère et sont d’intensité différente. Une mère pourra continuer à s’occuper de son bébé et être incapable de prendre une douche, une autre ne pourra plus quitter son lit, une autre encore pourra être totalement apte à tout réaliser et ne parviendra pas à s’occuper de son enfant. La tristesse liée à la dépression n’est pas synonyme de négligence envers le bébé.
Chaque femme est impactée différemment. Comprendre qu’il y a une multitude de réactions dans la DPP permet de mieux identifier et soutenir les mères qui en souffrent.
La dépression du post partum peut se manifester différemment chez les femmes. Le plus souvent on retrouve une irritabilité, des pensées sombres ou d’incapacité, de culpabilité, des troubles du sommeil. Si cet état impacte directement le bien être maternel, il n’a pas toujours une incidence sur le lien avec son enfant. Toutefois, une mère qui traverse une dépression du post partum, aura besoin d’un suivi incluant son bébé, afin de soutenir ses compétences parentales, et de restaurer la circulation des émotions positives dans la relation.