La dépression périnatale

Illustration Julie Bellarosa ™

Accueil
chevron
agir
chevron
Orienter
chevron
A partir de quand consulter ?

A partir de quand consulter ?

Fabienne Ligier,Elisabeth Michel, Aurélie Noullez, Pauline Sourlier

Apprenez à identifier le moment crucial pour chercher de l’aide professionnelle face à la dépression périnatale.

Signaux d’alerte : quand s’inquiéter

Description des signaux d’alerte indiquant la nécessité d’une consultation

Les émotions au cours de la période périnatale peuvent être ambivalentes, entre joie et irritabilité, bonheur et agacement ou inquiétudes. Il est primordial d’être attentif à ce que vous ressentez et de ne pas banaliser ces ressentis. Bien que souvent attribués à la grossesse ou aux suites « normales » de l’accouchement, ceux-ci peuvent être le témoin d’une détresse plus intense et d’une dépression pendant la grossesse ou en post-partum. Il est alors essentiel de solliciter de l’aide. Vous trouverez ci-dessous la liste des symptômes et signaux à surveiller.

  • Incapacité de se sentir en lien avec son bébé, de se le représenter (pendant la grossesse)
  • Sentiment diffus de ne plus être soi-même, d’être coupé de ses émotions
  • Perte de plaisir (dans les activités, dans sa vie sociale, dans les soins à bébé…)
  • Tristesse majeure
  • Crises de larmes
  • Difficultés à réaliser les tâches du quotidien, manque de motivation
  • Fatigue intense, manque d’énergie
  • Ralentissement psychomoteur
  • Troubles somatiques (douleurs abdominales, céphalées, …), Plaintes hypochondriaques
  • Irritabilité
  • Faible estime de soi
  • Sentiment d’incompétence maternelle, de culpabilité
  • Sentiment de désespoir
  • Inquiétudes disproportionnées, angoisses importantes (centrées le plus souvent sur l’enfant)
  • Troubles de la concentration
  • Impression de ne plus être connecté(e) aux autres
  • Pensées agressives envers le bébé
  • Modification de l’appétit : souvent diminué, parfois majoré
  • Troubles du sommeil
  • Idées suicidaires, envie de mourir

Première étapes et auto-évaluation

Bien que moins connue, la dépression anténatale (pendant la grossesse) est possible. Si durant votre grossesse, vous ressentez un mal-être persistant, ou une fatigue importante, n’hésitez pas à en parler à un professionnel de santé. La dépression périnatale : de quoi parle-t-on ?

Le baby-blues constitue un état passager, transitoire, qui survient dans les premiers jours suivant la naissance et dure quelques heures à quelques jours, rarement plus de 10 jours. Vos émotions sont exacerbées, qu’elles soient positives ou négatives, mais il vous est encore possible d’éprouver du plaisir. Votre entourage peut vous apporter du soutien et un apaisement, n’hésitez pas à les solliciter.

La dépression du post-partum est une maladie, vous la subissez et n’en êtes pas responsable. Ainsi, si vous ne vous sentez pas bien, il est important d’en parler avec vos proches et / ou avec des professionnels (médecin généraliste, sage-femme, gynécologue, puéricultrice …) qui seront à votre écoute. Ne banalisez pas les symptômes présentés puisque ceux-ci, souvent à tort attribués à la grossesse ou à une évolution normale après l’accouchement, peuvent être à l’origine d’une souffrance extrême.

Par ailleurs, si vous vous sentez dépassé, que les pleurs de votre enfant deviennent insupportables pour vous, placez votre enfant en sécurité, sur le dos dans son lit, et prenez quelques minutes pour vous apaiser ou chercher de l’aide. Secouer un bébé peut être à l’origine d’un handicap ou le tuer, une seule fois suffit !

Enfin, en cas d’idées suicidaires ou d’envies de mourir, vous pouvez contacter le 3114, numéro national de prévention du suicide, accessible 24h/24 et 7j/7, gratuitement et en France entière. Il est aussi possible de consulter au service d’urgences psychiatriques le plus proche.

Outils d’auto-évaluation et checklist

Vous pouvez vous poser les deux questions suivantes : « Avez-vous la sensation d’être parfois anormalement épuisée ou découragée ? » et « Éprouvez-vous parfois un sentiment de fatigue ou de lassitude qui vous conduit à pleurer ? ».

L’échelle suivante (EPDS ou échelle de dépression d’Edinburgh) vous permet de vous aider à évaluer ce que vous ressentez. Néanmoins, cette échelle ne vous permettra en aucun cas de vous « auto-diagnostiquer ».EPDS

Consulter un professionnel : options et processus

Informations sur les différents professionnels à consulter (psychologues, psychiatres, etc.)

La première étape est de parler de votre détresse et de vos difficultés. Vous pouvez dans ce cadre contacter votre médecin traitant, votre sage-femme, votre gynécologue, votre puéricultrice de la Protection Maternelle et Infantile, … qui sauront vous orienter vers une prise en charge spécialisée en cas de besoin. Même si le soutien de votre entourage est primordial, une aide professionnelle est aussi nécessaire. Il n’y a rien d’honteux en cela. La prise en charge est d’autant plus efficace que la souffrance est détectée précocement.

La psychothérapie constitue la pierre angulaire du traitement de la dépression du post-partum.

Vous pouvez consulter un psychologue, qui est un psychothérapeute ayant un diplôme universitaire de psychologie (licence + master) et n’est pas médecin. Celui-ci a une capacité d’écoute et d’aide.

Parfois, vous pourrez également consulter un psychiatre. Le psychiatre a réalisé des études de médecine et peut vous prescrire un traitement médicamenteux en cas de besoin. Il est aussi le seul à pouvoir poser un diagnostic. Pour rappel, le traitement médicamenteux n’est efficace qu’en parallèle d’une psychothérapie bien menée et peut être compatible avec la grossesse et l’allaitement. Le psychiatre assure la psychothérapie ou vous réoriente vers un psychologue pour ce faire.

Psychiatre et psychologue peuvent exercer en activité libérale ou en Centre Médico-Psychologique (CMP). Le psychologue en activité libérale n’est pas pris en charge par la Sécurité Sociale (hors certains psychologues sélectionnés par l’autorité compétente désignée par décret pour 12 séances/an et sans prescription médicale). Le Centre Médico-Psychologique constitue une structure de soins regroupant des professionnels de la santé mentale : psychologues, infirmiers, psychiatres, … et du secteur social : assistants de service social, éducateurs, etc. Les consultations au CMP sont gratuites, entièrement financées par la Sécurité Sociale. Les CMP sont sectorisés en fonction de votre lieu d’habitation.

Différentes méthodes psychothérapeutiques ont démontré leur efficacité dans la prise en charge de la symptomatologie dépressive en période périnatale : thérapies cognitivo-comportementales, thérapies interpersonnelles, hypnose, EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing ou Désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires), etc. Ces méthodes dépendent de la formation du professionnel et de votre symptomatologie.

Quelquefois, il peut vous être proposé d’intégrer un groupe thérapeutique ou un groupe de parole avec des patients, qui bien que singuliers, partagent des difficultés similaires aux vôtres. Ces groupes peuvent être proposés par certains professionnels libéraux et le plus souvent, par les CMP.

En cas d’intensité sévère de votre trouble, avec une répercussion sur le lien à votre enfant ou en prévention d’une telle conséquence, une prise en charge en unité de soins périnataux pourra vous être proposée. Les structures varient en fonction de votre lieu l’habitation et peuvent se composer de soins ambulatoires parent-bébé, d’hospitalisation de jour parent-bébé, d’hospitalisation complète parent-bébé, de consultations, etc. Ces unités de soins conjoints parent-bébé se composent d’une équipe pluriprofessionnelle avec des professionnels formés en périnatalité (pédopsychiatres, psychologues, infirmiers, éducateurs, etc.). Les objectifs d’une telle prise en charge sont de réaliser les soins au parent, d’accompagner les interactions parent-enfant, dans une démarche de prévention des troubles du développement chez l’enfant.

Quel que soit le professionnel que vous sollicitez, celui-ci ne vous jugera pas et est soumis au secret professionnel.

Consultation auprès d’un psychologue

La(les) première(s) rencontre(s) avec un psychologue consiste(nt) essentiellement à faire le point sur ce qui vous amène, vos éléments de vie et ce dont vous auriez besoin pour vous aider au mieux. Les consultations suivantes seront fonction de la formation du psychologue ; le rythme des rendez-vous est adapté à vos besoins et à votre demande (souvent 2 fois par mois, parfois plus fréquemment initialement). Les consultations se déroulent en tête-à-tête, vous êtes seul(e) avec le professionnel.

Consultation auprès d’un psychiatre

Tout comme les consultations auprès d’un psychologue, la(les) première(s) rencontre(s) consiste(nt) avant tout à apprendre à vous connaitre et à comprendre votre problématique. Souvent, le psychiatre vous interroge sur vos antécédents (maladies) tant somatiques que psychiques. Par la suite, il peut vous prescrire une thérapeutique, adaptée à vos symptômes, toujours avec votre accord et compatible soit avec la grossesse, soit avec l’allaitement si vous êtes concernée. Il établira également un diagnostic. Le déroulement des consultations change en fonction du thérapeute. Le rythme des séances est variable lui-aussi.

Consultation en Centre Médico-Psychologique

Cela peut varier en fonction du CMP dont vous dépendez. Le plus souvent, vous aurez un premier rendez-vous auprès d’un infirmier, afin de mieux vous connaitre et de déterminer vos objectifs. Ensuite, après une réunion d’équipe, vous pourrez être pris(e) en charge soit par cet infirmier référent, soit par un psychologue, et un psychiatre référent sera désigné en cas de nécessité d’introduction d’un traitement médicamenteux. Le rythme du suivi sera adapté à vos besoins et à vos demandes et les CMP peuvent aussi proposer des groupes de patients centrés sur un objectif précis (ex : groupes d’affirmation de soi, groupes d’habiletés sociales, etc.).

Dès les premiers symptômes de détresse, de tristesse ou d’asthénie (fatigue) majeure, il est fondamental de rechercher de l’aide auprès d’un professionnel de santé.

Le baby blues est passager, se résout spontanément, et survient dans les jours qui suivent la naissance. Au-delà de 10 jours, votre détresse marque peut-être la présence d’une dépression du post-partum et il est donc primordial de consulter.

Préparation à la consultation

Une consultation auprès d’un professionnel de la santé mentale peut constituer une source d’angoisses, puisque celle-ci vous invite à évoquer des notions personnelles ou émotionnellement difficiles. Ce professionnel est formé à l’écoute et au soutien de personnes en détresse, sans aucun jugement et dans le strict respect du secret professionnel. Il s’agit avant tout d’une rencontre entre deux personnes.

Avant de vous présenter au rendez-vous, vous pouvez réfléchir aux motifs vous ayant conduit à demander ce suivi, l’élément déclencheur et aux sujets que vous souhaitez évoquer. Il vous sera probablement demandé de définir des objectifs, vous pouvez déjà y réfléchir. Si vous avez peur d’oublier certains points lors de la consultation, n’hésitez pas à les noter au préalable.

Il est important d’être aussi honnête que possible sur vos ressentis, sans les minimiser. Contrairement aux idées reçues, le psychiatre ou le psychologue ne lisent pas en vous. Ils vous accompagnent en fonction de ce que vous livrez. Partager vos émotions, même difficiles, permet de faciliter le processus thérapeutique. Rassurez-vous, vous ne serez pas contraint(e) d’aborder certains sujets si vous ne le souhaitez pas ; vous restez libre de préciser que vous ne souhaitez pas parler de telle ou telle chose. Le thérapeute s’adaptera à votre rythme. N’ayez pas crainte d’être jugé, le thérapeute est formé pour vous écouter et vous comprendre sans aucun jugement.

Parfois, le thérapeute vous proposera de rencontrer votre entourage, toujours avec votre accord. Vous pouvez également vous rendre au premier rendez-vous accompagné(e) par votre conjoint(e) si cela vous rassure.

N’hésitez pas à poser des questions, il n’y a pas de « question bête ». Ne restez pas avec vos interrogations et incompréhensions.

Réfléchir aux motifs de la consultationNe pas hésiter à noter ce qui nous semble important à aborder
Réfléchir aux sujets que l’on souhaite évoquerÊtre aussi ouvert et transparent que possible

Bibliographie

"Instinct maternel", "seules

les mères sont touchées par

la dépression post-partum":

stop aux idées reçues !

Attendre un enfant avec impatience et amour ne signifie pas que l'annonce de la grossesse sera vécue comme la meilleure chose au monde. La dépression peut impacter n'importe qui. Elle est causée par une combinaison complexe de facteurs hormonaux, biologiques, environnementaux et psychologiques. La dépression périnatale touche 10% à 20% des femmes...

Devenir mère est un apprentissage et il est courant d’être déconnectée au début et incertaine dans les gestes. Une mère doit s’accorder une bonne dose de bienveillance et d’indulgence. Parfois, perdue dans un flot d’émotions, elle n’ose pas se confier. Or, en discutant, d’autres ressentent les mêmes sentiments.

La dépression n’est pas héréditaire. Avoir un parent qui a eu une dépression ne signifie pas que l’on aura une dépression à notre tour. Cela peut augmenter le risque mais il ne s’agit que d’un risque, pas d’une certitude. Beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte, comme le contexte de vie, l’entourage, l’histoire de chacun, notre gestion du stress, et les facteurs biologiques. Il est possible au contraire de n’avoir aucun parent sujet à la dépression et développer soi-même un état dépressif. La maladie peut toucher tout un chacun. L’important est d’en reconnaître les symptômes et de bénéficier de l’aide de son entourage, des soignants.

Un papa qui se met en retrait, un papa qui n’arrive pas à s’occuper de son bébé ou qui a des variations d’humeur importante peut également souffrir de dépression. Si ces signes sont repérés, il faut en parler, consulter. La dépression n’est pas réservée aux mères et peut très bien toucher le père, concomitamment à la mère ou non.

La dépression post partum peut toucher la mère et/ou le père à tout moment pendant l’année suivant la naissance. Il faut la distinguer du "baby blues", une période de légère tristesse pouvant être ressentie jusqu’au dixième jour suivant l’accouchement et qui disparaît rapidement

La dépression périnatale ne se manifeste pas de la même manière et avec la même intensité chez toutes les mères. Certaines continuent à très bien s’occuper de leur bébé, même si elles sont émotionnellement détachées ou submergées. D’autres vont se surinvestir, continueront à s’occuper de leur bébé en étant incapables de prendre une douche, ne pourront plus quitter leur lit, ou encore réaliseront tout cela sans parvenir à s’occuper de leur enfant.

Articles associés

Comment réagir face à une situation de détresse ?

Que l’on soit parent, ami, proche, professionnel de santé, collègue ou responsable en entreprise, chacun peut être confronté à la dépression périnatale chez quelqu’un. Dès lors, comment être sûr d’avoir les bons mots, les bons réflexes et d’aider au mieux la personne ?

Vers qui se tourner lorsque des symptômes se présentent ?

Vers qui se tourner lorsque des symptômes se présentent Identifier les symptômes et quand chercher de l’aide Professionnels de santé à contacter Soutien psychologique et thérapeutique Ressources communautaires et en ligne Créer un réseau de soutien