Face à une personne présentant des symptômes évocateurs d’une dépression périnatale, il n’est jamais aisé de savoir comment l’aider au mieux. Comment réagir ? Comment trouver les bons mots ? Quels sont les bons réflexes à adopter dans cette situation ? LENA vous dit tout.
Étape 1 : écouter et ne pas minimiser les ressentis de la personne
« Mettre des mots sur les maux »
La priorité est d’établir un espace de parole sécurisant pour permettre au parent de s’exprimer.
La personne n’exprime pas toujours ses symptômes du fait d’une forte culpabilité (« J’ai tout pour être heureuse ») et la peur d’être qualifiée de « mauvaise mère ». Ainsi, les symptômes dépressifs classiques (tristesse de l’humeur, perte d’envies et de plaisir, etc.) sont souvent au second plan. Dès lors qu’il existe des doutes concernant l’état psychique d’une personne, il est important de lui en faire part et de se montrer à l’écoute, sans émettre aucun jugement et se mettant en retrait des fonctions de transmissions de savoir-faire ou de conseil. Cela permet au parent de se confier et d’ouvrir les échanges. Prendre le temps et cheminer à la même vitesse que le parent constituent les maitres mots ! Écouter et respecter les perceptions du parent sont indispensables au renforcement de l’alliance thérapeutique/relationnelle.
Nommer et normaliser les émotions que l’on perçoit chez la personne qui nous semble en souffrance permet de lui signifier qu’elle a été entendue et qu’elle n’est pas seule. Par cette écoute attentive et bienveillante, la personne se sent comprise et apaisée par la disponibilité de son interlocuteur et perçoit son rôle de soutien émotionnel.
En ce qui vous concerne
Accueillir les difficultés d’une personne n’est pas toujours chose aisée et peut s’avérer déstabilisante. Si votre proche ou votre patient présente une détresse en période de per- ou post-partum, l’important est de ne pas se laisser envahir par ses propres émotions. En effet, celui-ci se sentira davantage rassuré si vous semblez être confiant, tout en vous montrant empathique. Par ailleurs, il n’est pas toujours facile, si vous êtes vous-même passé par l’étape de la maternité, de ne pas raconter dans le détail votre propre ressenti quant à votre maternité. N’oubliez pas que chaque vécu de maternité est différent et qu’il est avant tout important d’être à l’écoute de façon ouverte, plutôt que de comparer avec votre propre situation. Vous pouvez simplement éventuellement abonder dans le sens de la personne en souffrance en répondant : « C’est vrai, on en parle peu, mais je me souviens moi aussi de moments difficiles. » Face à un retentissement émotionnel intense avec pleurs, laissez-lui (et laissez-vous) un temps de silence, de pause, ce qui vous permettra de reprendre le fil de votre conversation de manière plus apaisée et d’avoir pris un certain recul quant à la situation. Si cela devient trop compliqué pour vous, en raison de votre propre histoire et de votre propre vécu par exemple, vous pouvez tout à fait expliquer à votre proche ou patient que cela vous touche beaucoup, que vous êtes là pour lui et le soutenir, et l’orienter vers une structure adaptée.
« Je suis fatiguée »
« J’ai l’impression de ne pas être une bonne mère »
« Mon bébé pleure beaucoup et je n’en peux plus »
« J’ai l’impression que je n’arrive pas à être parent »
« Je suis débordé(e), j’ai l’impression que je n’y arriverai jamais »
« Mon accouchement était horrible »
« Parfois j’ai envie de revenir en arrière. Je n’aurais jamais dû avoir ce bébé. J’ai envie de tout quitter, de m’en aller. »
Étape 2 : rassurer
« Il faut tout un village pour élever un enfant » - Proverbe africain
La grossesse et la naissance d’un enfant constituent des facteurs de stress majeurs. Rassurer la personne sur ses ressentis et émotions est primordial. Une psycho-éducation est nécessaire, insistant notamment sur la fréquence élevée de cette maladie : la dépression du post-partum concerne 2 femmes sur 10 et 1 père sur 10. Cela permet ainsi de diminuer le sentiment de solitude de la personne concernée. Expliquer à la personne qu’elle n’est pas seule et que même si on entend souvent que l’arrivée d’un enfant est un moment « magique », « de bonheur », il arrive de ne pas se sentir heureux immédiatement après l’accouchement, d’avoir peur de ne pas y arriver, ou de présenter des idées suicidaires… L’important est d’en parler, et donc valoriser le parent sur sa démarche.
Déconstruire les pensées négatives sur ses capacités parentales et déculpabiliser le parent quant à la situation doit être au cœur des propos, tout en maintenant une attitude de prévenance. Rappeler qu’élever un enfant n’est pas une tâche facile, que le parent apprend à connaitre son enfant et que l’enfant apprend à connaitre son parent.
L’enjeu est de déculpabiliser le parent face à ses difficultés psychiques. En effet, ce n’est pas parce que cet enfant était désiré que tout doit être simple. Les parents doivent donc être invités à exprimer que tout ne se passe pas comme imaginé durant la grossesse, que c’est plus difficile. Normaliser les ressentis et émotions de la personne permet de rassurer quant à la non-responsabilité du parent par rapport à son état clinique.
Par l’observation minutieuse des interactions parent-bébé, il est aussi possible de réaliser un travail de réassurance parentale.
"Savoir ne protège pas, mais ignorer fragilise."
Marinette, Bénevole au sein de l'association Maman Blues
S'informer : ou comment se préparer aux risques et mieux identifier les difficultés lorsqu'elles surviennent
Étape 3 : Inciter à s’auto-évaluer
Destinée aux femmes enceintes ou aux femmes ayant eu un bébé récemment, l’EPDS (Edinburgh Postnatal Depression Scale) est un auto-questionnaire de dépistage de la dépression postnatale d’utilisation simple et dont la validation française a été établie. C’est un outil de choix parce qu’elle ne nécessite aucune formation et permet de faciliter le dialogue sur la souffrance psychique, tout en déculpabilisant la personne de ses difficultés. En ouvrant un espace de parole avec le parent, cette échelle permet une orientation vers une prise en charge adaptée en cas de besoin. Constituée de 10 items côtés entre 0 et 3, son score final varie entre 0 et 30, avec un seuil de 10. Plus le score est élevé, plus le risque de dépression est important et plus la dépression est sévère. Elle permet, de plus, de rechercher des facteurs de gravité tels que les idées suicidaires, l’impact sur l’enfant, un isolement social ou familial, une précarité. Son temps de passage est court, 5 à 10 minutes maximum. Elle est facilement utilisable par des non-spécialistes
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Vous attendez un enfant ou vous venez d’avoir un bébé, et vous vous questionnez autour d’une dépression du per-partum ou du post-partum. Ce questionnaire a été conçu pour déterminer si vous présentez des symptômes liés à une dépression du post-partum. Néanmoins, ce test permet de faire le point sur votre ressenti post-accouchement, mais ne permet pas de poser un diagnostic. Le résultat sera à confronter avec un professionnel de la santé mentale et votre symptomatologie clinique.
Étape 4 : orienter et proposer des pistes de prise en charge
Il est indispensable de ne pas laisser la personne seule face à sa détresse et, outre une écoute bienveillante, de savoir l’orienter vers un interlocuteur adapté. La disponibilité de l’interlocuteur, son rôle de soutien émotionnel et des solutions d’aide pratiques constituent une part importante de la prise en charge initiale.
Dans un premier temps, vous pouvez mobiliser et interroger au maximum l’autre parent s’il est présent. Il est aussi nécessaire de rechercher des ressources familiales (grands-parents, cousins, cousines) ou amicales qui pourraient venir seconder le parent. Il est en effet important pour le parent présentant une dépression du post-partum de pouvoir être soulagé sur des temps durant lesquels il ne s’occupe pas de l’enfant. L’accueil en crèche est aussi recommandé pour apporter un soutien dans le rôle parental. Le parent peut aussi être informé de l’existence des Réseaux d’Écoute, d’Appui et d’Accompagnement des Parents (REAAP), qui prennent appui sur un réseau de parents, de bénévoles et de professionnels.
Avec souvent une charge mentale majeure et un sentiment d’être débordé, l’orientation de la dyade vers la Protection Maternelle et Infantile du secteur peut permettre au parent de se sentir soulagé. En effet, la puéricultrice pourra accompagner et soutenir la famille ou encore demander l’intervention d’une Travailleuse d’Intervention Sociale et Familiale (TISF). La TISF permet d’échanger sur ses ressentis, d’alléger sa charge mentale et peut également aider le parent à trouver des solutions dans certaines situations. Elle peut aussi permettre au parent de prendre du temps pour soi, en prenant en charge l’enfant. Un mode d’accueil peut aussi être envisagé (crèche, assistante maternelle) pour soulager les parents en accueillant l’enfant sur un ou plusieurs jours dans la semaine.
Pour lutter contre le sentiment d’isolement, le parent peut être orienté vers un Lieu d’Accueil Parent-Enfant (LAPE ou LAEP). Il s’agit d’un espace où peuvent être accueillis tous les enfants de moins de 6 ans avec leur parent ou un proche familier (grand-parent, assistante maternelle…). Cet endroit lui permettra d’échanger avec d’autres parents et d’être accompagné sur les jeux à réaliser avec son enfant. Des accueillants, formés à la parentalité et à la petite enfance, seront également présents pour répondre aux questions du parent ou de l’accompagnant. C’est un dispositif soutenu et financé par la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) et on en retrouve un par département. Les Relais Petite Enfance (RPE) constituent également un lieu d’échanges avec d’autres parents et des professionnels de la petite enfance. Ces RPE organisent des temps collectifs (réunions à thème, conférences, etc.) et des temps d’activités d’éveil (ludothèques, autres structures existantes…). Le parent peut aussi être aiguillé dans ce type d’accueil. Les parents peuvent aussi être orientés vers des groupes de soutien à la parentalité ou vers des associations d’aide à la parentalité tels que l’association Maman Blues, le numéro vert « Allo Parents Bébé » (0 800 00 3456), …. Le forum de l’association Maman Blues, particulièrement précieux, leur permettra de raconter, de façon anonyme, le ressenti de leur vécu, et de bénéficier de réponses rapides et attentives de la part des bénévoles comme d’autres mères. La lecture des témoignages des autres mères leur permettra aussi de dédramatiser leur propre situation en se reconnaissant dans celle des autres. L’association assure aussi un suivi des personnes qui se connectent en leur demandant de leurs nouvelles, et oriente également celles-ci vers les diverses structures présentées ici, selon le cas.
La maman peut aussi être orientée vers sa sage-femme ou son médecin traitant pour permettre une première évaluation de la symptomatologie. En cas de besoin, un suivi psychologique pourra être envisagé que ce soit en libéral ou en structure de soins type Centre Médico-Psychologique.
Outre le soin individuel, parfois, une prise en charge plus intensive et davantage centrée sur les interactions parent-enfant est indiquée. Des services de psychiatrie périnatale permettent la mise en œuvre de ces soins spécialisés, sous la forme de soins ambulatoires, d’hospitalisation de jour ou encore d’hospitalisation à temps complet. Ces structures ont pour objectif le soin du parent, associé au travail du lien parent-enfant, dans une démarche de prévention de troubles du développement chez l’enfant.
Il est essentiel d’accompagner le parent présentant une dépression du post-partum pour solliciter ces différentes aides. En effet, celui-ci n’aura pas forcément l’énergie pour appeler et s’y rendre, en raison des symptômes dépressifs. Il s’agit dans ces cas de « materner » le parent pour qu’il puisse lui-même prendre soin de son enfant.
Les idées suicidaires constituent un signal d’alarme urgent et doivent être considérées rapidement. Le parent doit être orienté vers le service d’urgences psychiatriques le plus proche et le 3114 communiqué, numéro national de prévention du suicide qui fonctionne 24h/24 et 7j/7. En cas de risque suicidaire imminent, il est aussi possible d’appeler le 15 (SAMU) ou le 112 (numéro européen).
Ce qu’il faut retenir
Les questions les plus fréquentes :