La dépression périnatale

Illustration Julie Bellarosa ™

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Se reconstruire et reconstruire le lien

Se reconstruire et reconstruire le lien

Sylvie Viaux Savelon, Clémentine Sobera, Odile Flament, Chloé Bedouet
#Parentalité

Conseils d’Elodie, Maman de deux enfants qui ont maintenant 8 et 10 ans

Se reconstruire ?

Reconstruire comment fait-on me direz-vous ? C’est une grande question qui préoccupe tous les parents qui ont ce sentiment que tout est détruit, broyé, déchiqueté par la violence du vécu à l’arrivée de bébé. Alors par où commencer ? Je vais tenter ici de vous dire ce qui moi m’a aidée…
D’abord prendre conscience que se reconstruire est un chemin qu’on ne gravira pas seul(e). Il y aura des hauts et des bas, c’est logique et non inquiétant. La durée n’est pas prédéfinie. Ce qui commence de manière abrupte et douloureuse peut se poursuivre en promenade agréable. Le soleil se lève en chemin !

La reconstruction est un chemin et non une fin en soi !

En ce qui me concerne devenir maman a été un énorme chambardement. Ce qui m’a le plus aidée a été de m’accorder peu à peu un temps pour moi. Un temps pour me poser, un temps pour m’écouter. Vous direz « hum étrange, bébé attend et maman s’étend ? ». Et bien oui, parce que prendre ce recul m’a permis de comprendre que je n’étais pas uniquement une maman, mais bien autre chose. Je n’avais ni disparu, ni ne m’étais dissoute dans cette maternité. Non, j’avais additionné un nouveau rôle. Il fallait donc comme un équilibriste sur sa corde trouver comment procéder pour avancer sans tomber !

Prenez du temps pour vous-même et autorisez vous à faire ce qui vous plait !

On oublie trop souvent qu’une maman bien dans ses chaussures, c’est la promesse de passer un temps de qualité avec son enfant… Donc en plus de prendre du temps, ne pas hésiter à l’utiliser pour faire ce que vous aimez. Au début, je ne savais plus ce que j’aimais, alors j’ai fait ce que j’aimais avant ! Dans le choix des activités, la diversité est énorme. Pour moi ce fut dessin, puzzle ou lecture mais pour d’autre c’est shopping, sport, sortie avec des amies, coiffeur, massage, etc. Peu importe en réalité, ce qui est important est de se laisser respirer et porter par le moment présent !

Demandez de l’aide !

Ensuite, j’ai choisi d’accepter les formes d’aides qui me faisaient du bien, qu’elles soient médicales, associatives, familiales ou amicales ! J’ai ainsi été accompagnée par une Technicienne de l’intervention sociale et familiale (TISF), qui a gardé le plus petit pour que je joue avec l’aîné. Les grands parents ont parfois pris la relève et permis un diner en amoureux. Mon conjoint a proposé un massage. La psychologue m’a permis de mettre en mots et de décortiquer ce qui se passait pour moi. Avec la sophrologue j’ai pu visualiser le lien compliqué avec mon fils. Des amis m’ont organisé une sortie au musée pendant que papa gérait la troupe… Ce n’est pas facile, mais c’est libérateur de se rendre acteur !

Acceptez de vous faire plaisir

Créer ma propre définition de la relation mère-enfant, de ce qu’est une maman a été libérateur. Je me suis offert cette liberté d’inventer des solutions à mon image, des solutions uniques. Lesquelles me direz-vous ? Allez, je vous donne un exemple ! Accrocher une ficelle à l’arche du transat de mon bébé pour pouvoir le bercer en restant allongée 😊. Il suffit parfois simplement de s’écouter et de décider d’une journée où tout le monde reste en tenue de nuit, de lire allongée dans l’herbe avec bébé sur son tapis d’éveil. De s’autoriser à simplement le rapprocher et l’allaiter en continuant de bouquiner… Bref, c’est accepter de se libérer de ce qu’on croit devoir faire pour faire ce qui nous correspond. Devenir parent, c’est libérer sa créativité, se faire confiance.

Partager des activités

Au lieu de chercher à faire des activités uniquement pour les enfants, je me suis autorisée à faire des activités que j’aimais en les partageant avec mes enfants. Cela m’a vraiment aidée ! C’est ainsi que je leur ai fait la lecture, que je les ai emmenés au musée en vélo, que nous avons fabriqué des chevaux en bois ensemble, fait un atelier de dessin commun dehors, etc. Ces moments de partage permettent de retrouver le plaisir d’être avec eux et crée du coup un lien agréable pour tout le monde sans se forcer, c’est tout gagné !

Le soleil se lève en chemin !

Voilà mes astuces de maman, que j’ai pu trouver pour avancer et monter l’escalier une marche après l’autre. J’ai souvent redescendu quelques marches, je me suis arrêtée, mais au final je l’ai grimpé cet escalier ! Ma plus belle récompense a été le jour où mon enfant m’a dit : « tu sais maman, avec tout le mal que tu t’es donné, moi je sais que tu m’aimes vraiment, je ne peux pas en douter » …

Les conseils des professionnels : Identifier ses ressources et les facteurs de stress pour trouver son équilibre

Identifier vos ressources et facteurs de protection

Qu’elles soient internes ou externes, travailler sur vos ressources permettra de trouver votre équilibre !
  • Quels sont les professionnels de santé physique et mentale qui vous suivent ?
  • Quelles sont les personnes à qui vous pouvez vous confiez sans jugement ?
  • Quelles sont les personnes autour de vous pouvant vous offrir un soutien pratique dans la vie quotidienne, un relai avec votre bébé ?
  • Quelles sont les personnes vers qui vous pouvez vous tourner pour bénéficier de conseils sur la parentalité ?
  • Quelles sont les personnes avec qui vous pouvez partager des centres d’intérêts communs ?
  • Quelles activités vous permettent de vous sentir mieux ? (méditation pleine conscience ? yoga ? activité sportive ? activité artistique ?)
  • Qu’est-ce qui provoque chez vous de la joie, du plaisir ?
  • Identifier des moments agréables que vous avez vécu ces derniers jours : pour vous ? avec votre bébé ? avec d’autres personnes ?
  • Dormez-vous suffisamment ?
  • Arrivez-vous à manger correctement ?

Identifier les facteurs de stress

Identifier les facteurs de stress dans votre vie permettra d’anticiper au mieux la réponse que vous pourrez y apporter.
  • Quelles sont les situations ou évènements qui sont pour vous particulièrement stressants ou épuisants ?
  • Avez-vous pu en discuter avec quelqu’un ?
  • Quelle réponse pouvez-vous y apporter ?
  • Quelle stratégie pourriez-vous adopter pour réduire l’impact de cette situation sur votre santé mentale ?

Technique de régulation des émotions : ABC PLEASE (issue de la thérapie comportementale dialectique -TCD- de Marsha Linehan) :

  • A : accumuler des émotions positives à court terme (faire des choses plaisantes possibles maintenant) et à long terme (faire des changements dans sa vie afin que les évènements positifs se produisent plus fréquemment à l’avenir) pour construire une vie qui vaut la peine d’être vécue.
  • B : bâtir son expertise : faire des choses qui font se sentir compétent et efficace pour combattre l’impuissance et le désespoir.
  • C : être capable d’anticiper pour faire face aux situations émotionnelles (répéter un plan à l’avance afin d’être préparé à faire face de manière compétente aux situations émotionnelles)
  • PL : prendre soin de la santé
  • E : éviter les substances
  • A : alimentation équilibrée
  • S : équilibrer le sommeil
  • E : exercice physique.
Exemple en vidéo

Prendre du plaisir avec son bout’chou

Vous l’avez attendu, vous vous êtes attendue au miracle de la naissance et de la rencontre et finalement vous ne ressentez rien, tout est difficile. La rencontre avec son enfant c’est aussi un chemin, ça se construit, s’alimente, il y a des hauts et des bas. Avec la fatigue, le manque de sommeil, on perd vite ses repères, on ne sait plus qui écouter et quoi faire. En tant que parent c’est nous qui connaissons le mieux notre enfant, mais il faut réussir à s’écouter alors qu’on hésite, on doute.

Pour se faire confiance, on a souvent besoin que d’autres vous confirment que vous faites bien les choses. Le doute est nécessaire mais parfois il est envahissant. Une personne de votre entourage qui vous fait du bien, vous soutient, vous conforte et vous dit que vous êtes sur le bon chemin, suffit à redonner de l’énergie. Si vous ne l’avez pas dans votre entourage, des professionnelles sont là pour ça, les puéricultrices de PMI, la TISF, les professionnels des Lieux d’Accueil Parents Enfant (LAEP) ou des unités de psy-périnatalité de votre secteur. Si vous êtes perdue, n’hésitez pas à rappeler la maternité où vous avez accouché, ils sauront vous orienter. Mettez à distance toutes les personnes qui jugent, sont intrusives ou vous disent que vous devriez faire comme elles ! Vous les reverrez plus tard, quand vous aurez pris vos marques. Si vous n’arrivez pas à les éloigner, demander à votre conjoint, cela fait partie de son rôle de vous protéger et de vous soutenir.

Si vous vivez des moments magiques de rencontre avec votre enfant, quand il vous regarde, qu’il sourit, qu’il est bien dans vos bras et que vous ressentez du plaisir à être en relation avec lui, appuyez-vous dessus. Vous pouvez par exemple en noter le ressenti pour ne pas l’oublier. Ces moments redonnent de l’énergie pour tous les moments difficiles. Si votre bébé n’est pas confortable, qu’il pleure tout le temps, n’est pas détendu, ces moments-là sont plus ténus, moins fréquents et le découragement peut vous envahir. Ce sont en général de « petites choses » : coliques, reflux, maux de ventre, qui ne mettent pas sa vie en danger, mais le rendent inconfortable, irritable, et qui sont parfois banalisés par les professionnels et l’entourage. « Ça va passer », mais ces moments sont longs, décourageant et peuvent vous donner l’impression de « ne pas être une bonne mère ». Il est important dans ce cas d’avoir du relais, de pouvoir le confier une heure ou deux pour reprendre son souffle, de le poser dans son lit, même si il pleure et d’appeler une amie, une personne de la famille qui vous fait du bien. Le.la conjoint.e lorsqu’il.elle rentre du travail arrive avec un regard neuf sur la situation, lui laisser ce moment privilégié pour vous reposer permet à chacun de trouver sa place.

Le nouvel équilibre de la vie à trois

La vie à trois est une nouvelle aventure pour votre couple. Elle réveille pour chacun des parents ses liens avec ses propres parents, ses histoires d’enfance, ses représentations du parent qu’il souhaite être et de l’éducation qu’il veut transmettre à son enfant. Il ne s’agit pas des mêmes relations que celle du couple. Les nouveaux parents qui n’ont pas eu de figure parentale stable quelles qu’en soit les raisons, se sentent plus fragiles lors de la construction de ce nouvel équilibre. Échanger avec son.sa conjoint.e pour savoir pourquoi telle ou telle attitude est importante pour lui.elle, limite en général les quiproquos et les tensions qui peuvent rapidement s’installer avec le manque de sommeil et la fatigue. Ce sont parfois des questions simples qui créent des « frictions » : la tétine, le portage, le lieu de couchage du nouveau-né, le laisser pleurer ou ne pas le laisser pleurer, les modalités de l’allaitement… Prendre le temps de décider ensemble ce que vous voulez faire, permet d’être plus cohérents et affirmés auprès de votre enfant qui suivra plus facilement le rythme que vous choisirez.

"Instinct maternel", "seules

les mères sont touchées par

la dépression post-partum":

stop aux idées reçues !

Attendre un enfant avec impatience et amour ne signifie pas que l'annonce de la grossesse sera vécue comme la meilleure chose au monde. La dépression peut impacter n'importe qui. Elle est causée par une combinaison complexe de facteurs hormonaux, biologiques, environnementaux et psychologiques. La dépression périnatale touche 10% à 20% des femmes...

Devenir mère est un apprentissage et il est courant d’être déconnectée au début et incertaine dans les gestes. Une mère doit s’accorder une bonne dose de bienveillance et d’indulgence. Parfois, perdue dans un flot d’émotions, elle n’ose pas se confier. Or, en discutant, d’autres ressentent les mêmes sentiments.

La dépression n’est pas héréditaire. Avoir un parent qui a eu une dépression ne signifie pas que l’on aura une dépression à notre tour. Cela peut augmenter le risque mais il ne s’agit que d’un risque, pas d’une certitude. Beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte, comme le contexte de vie, l’entourage, l’histoire de chacun, notre gestion du stress, et les facteurs biologiques. Il est possible au contraire de n’avoir aucun parent sujet à la dépression et développer soi-même un état dépressif. La maladie peut toucher tout un chacun. L’important est d’en reconnaître les symptômes et de bénéficier de l’aide de son entourage, des soignants.

Un papa qui se met en retrait, un papa qui n’arrive pas à s’occuper de son bébé ou qui a des variations d’humeur importante peut également souffrir de dépression. Si ces signes sont repérés, il faut en parler, consulter. La dépression n’est pas réservée aux mères et peut très bien toucher le père, concomitamment à la mère ou non.

La dépression post partum peut toucher la mère et/ou le père à tout moment pendant l’année suivant la naissance. Il faut la distinguer du "baby blues", une période de légère tristesse pouvant être ressentie jusqu’au dixième jour suivant l’accouchement et qui disparaît rapidement

La dépression périnatale ne se manifeste pas de la même manière et avec la même intensité chez toutes les mères. Certaines continuent à très bien s’occuper de leur bébé, même si elles sont émotionnellement détachées ou submergées. D’autres vont se surinvestir, continueront à s’occuper de leur bébé en étant incapables de prendre une douche, ne pourront plus quitter leur lit, ou encore réaliseront tout cela sans parvenir à s’occuper de leur enfant.

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